Canalblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
Publicité
Dernières Séances
25 septembre 2010

Alice au Pays des Merveilles, de Lewis Carroll - Adaptation par Tim Burton

A sa sortie, l'adaptation cinématographique du roman de Lewis Carroll par Tim Burton s'est copieusement faite éreinter par la critique et les cinéphiles. A l'époque, je n'avais pas vraiment su formuler mon opinion à son sujet. Quelques pensées émergent aujourd'hui, plusieurs mois après :

- l'usage de la 3D était totalement superflu et n'apportait strictement rien au film, à l'instar de la majeure partie des productions qui usent et abusent actuellement de ce procédé qui n'est pas selon moi promis à un aussi bel avenir que je l'imaginais au moment de Avatar : je n'ai conservé aucun souvenir du moindre plan où la 3D m'aurait impressionné. A contrario, les décors et les costumes ont su me charmer dès les premières séquences.

   

alice

 

- l'univers de Lewis Carroll semblait (trop ?) correspondre de manière saisissante à celui de Tim Burton, quasiment comme si l'écrivain britannique avait construit un monde en se basant sur l'oeuvre du cinéaste américain et en décalquant ses obsessions habituelles : l'attente du public était donc considérable mais, sans être déshonorante, cette adaptation manquait singulièrement de la folie burtonienne présente dans ses autres films majeurs. Nous pensons plus particulièrement au personnage du Chapelier, interprété par Johnny Depp, qui aurait dû incarner à lui seul toute cette folie et ce décalage, mais qui reste trop souvent dans les rails, comme paralysé par l'ampleur d'un projet trop sage.

 

alice_in_wonderland_movie_poster_character_white_rabbit_MTV_branded

  

- le scénario comporte un atout mal exploité et une idée proche du cliché : le postulat de départ est excellent, cette idée de débuter par un personnage au bord de l'âge adulte mais qui décide de replonger dans les rêveries de son adolescence, rejoignant ainsi toute une galerie de personnages de la même famille dans les précédents films de Tim Burton (idée probablement issue en partie du deuxième tome des aventures d'Alice par Lewis Carroll, De l'autre côté du miroir, que je lirai prochainement) ; par contre, l'irruption de l'Heroïc Fantasy au beau milieu de l'intrigue (la quête d'Alice et son combat contre le dragon) relève au mieux de la faute de goût (entre autres avec la décapitation du monstre), au pire du hors sujet complet ou de la copie sur le voisin - on ne soupçonnait pas qu'Alice avait un quelconque rapport avec les "Terres du Milieu" du Seigneur des Anneaux !

 

Alice

 

S'il s'agit à présent d'être plus indulgent vis à vis du film de Tim Burton, l'examen du roman de Lewis Carroll peut y contribuer, si tant est qu'on ne se laisse pas influencer par l'aura de génie qui plane au-dessus de cette oeuvre. Je ne l'avais jamais lu intégralement mais simplement dans des versions expurgées ou raccourcies pour les enfants, et je me demande d'ailleurs si ceux qui le tiennent en haute estime l'ont véritablement parcouru dans sa version complète. Et quitte à commettre un blasphème à l'égard de ceux qui voient dans ce texte un chef d'oeuvre absolu, il me semble qu'il n'est pas bien difficile de déboulonner ce mythe. Là aussi, le postulat de départ du roman de Lewis Carroll est magnifique et peut être considéré comme une série de variations fabuleuses autour du vertige que constitue le passage de l'enfance à l'adolescence. Mais ce thème s'épuise très rapidement en quelques chapitres et l'intérêt s'étiole à mesure qu'apparaissent de nouveaux personnages qui surgissent du néant pour y retourner quelques pages plus loin. Carroll saute du coq à l'âne sans arrêt, ou devrais-je dire du lapin à la chenille, accumulant les non-sens et les délires en roue libre. Certains y voient la marque de son génie et se réfugient derrière le bien commode humour anglais (dénomination relativement classique pour qualifier tout passage abscons et gentiment surréaliste auquel on prête une intention humoristique plus ou moins inaboutie) pour justifier ces péripéties où se perdent tous les fils narratifs (Alice pourrait rencontrer de tels personnages de manière infinie sans que cela change quoi que ce soit à l'histoire).

  

alice-2010-whole-poster

Dès lors, les actions se réduisent la plupart du temps à d'improbables dialogues construits sur un empilement de jeux de mots plus ou moins fins : si l'on décide alors de résumer l'intrigue du roman, tout lecteur se rend compte rapidement qu'elle se réduit à une peau de chagrin puisqu'il ne s'y passe quasiment rien. A partir de là, il semblait suicidaire pour un cinéaste d'adapter les logorrhées successives des souris, dodos et autres tortues, qui auraient fait sombrer dans l'ennui le spectateur le plus conciliant. Alice n'est d'ailleurs le plus souvent qu'une pure spectatrice elle-même de ses propres aventures dans le roman, elle ne prend quasiment jamais part à la moindre action et subit, sans réellement s'y opposer, l'imbroglio au sein duquel elle a atterri. Lewis Carroll ayant à mon sens totalement perdu en cours de route ce qui faisait l'intérêt de son texte (traduire les états d'âme d'une enfant hésitant entre enfance et monde adulte), il semble difficile de reprocher totalement à Tim Burton d'avoir souhaité recréer un minimum de cohérence et de progression dramatique au sein de son scénario même si, comme je l'ai indiqué plus haut, le recours au dragon de service paraît une solution de facilité qu'il aurait dû éviter.

Publicité
Publicité
Commentaires
Dernières Séances
  • Autobiographie en films. Une bonne critique de film nous en révèle souvent autant sur son auteur que sur le film lui-même : mes textes parlent donc de mes goûts cinématographiques, de ce qui me construit au cinéma, mais aussi de... moi. Bienvenue !
  • Accueil du blog
  • Créer un blog avec CanalBlog
Publicité
Newsletter
Derniers commentaires
Visiteurs
Depuis la création 32 099
Publicité