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6 décembre 2012

Tabou, de Michel Gomes

Les louanges critiques frôlent le délire quasi général au sujet de Tabou, du cinéaste portugais Michel Gomès tandis que, sorti le même jour, Les Hauts de Hurlevent (dont nous reparlerons) ne reçoit qu'une indifférence polie, dans le meilleur des cas. Et pourtant...

    

tabou_affiche

   

Conçu en partie comme un hommage poétique à l'aube du cinéma (le titre est une référence explicite à Murnau), pendant plus intellectuel et réflexif de The Artist, Tabou réussit à mon sens l'exploit inédit d'être le film muet le plus bavard de toute l'histoire du cinéma. On peut ne pas partager mon avis, mais le Septième Art, dans mon esprit, se caractérise par l'entremêlement épuré des images et des sons : les bruits, les effets sonores, la musique et, dans une moindre mesure, les dialogues. Une prépondérance de discours dans un film déplace souvent pour moi le curseur cinématographique vers le monde du théâtre : c'est en partie ce que je peux reprocher à Woody Allen, même si, bien sûr, des exceptions peuvent se présenter (songeons notamment à la manière dont Tarantino s'approprie la notion même de dialogue). Lorsque j'examine les films qui figurent dans mon Panthéon personnel, je me rends compte que nombre d'entre eux ne reposent presque pas sur le dialogue, et quand je réfléchis à mes plus grands instants de plaisir cinématographique, surgissent de ma mémoire des séquences amples et développées durant lesquelles aucun traître mot n'est échangé.

   

tabu-gomes-1

     

Tabou repose sur une intrigue romantique bateau qui n'a selon moi guère d'originalité : une passion amoureuse sur fond d'histoire coloniale portugaise. Le renouvellement certain opéré par Gomès repose intégralement sur sa forme. Des nappes entières d'une voix off extrêmement littéraire viennent inonder le récit et, si elles peuvent créer un effet hypnotique intéressant au bout de quelques minutes, instillant un fort sentiment de mélancolie sourde, elles se révèlent au final soporifiques également. Restent des moments suspendus de trouvailles dans la mise en scène, en particulier dans ces instants que je qualifierai de faux muet, où cette voix désincarnée narre les propos échangés en sourdine par deux personnages à l'écran, tandis que résonnent, dans l'arrière plan silencieux, quelques sons d'une nature indifférente aux turpitudes de l'âme humaine, "comme si les mots échangés entre les personnages s'étaient perdus dans le temps", dit le réalisateur. Quelques moments émouvants, par conséquent, mais pas de quoi casser trois pattes à un pauvre crocodile ni trois doigts à un critique en mal de sensations...

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Commentaires
F
Magnifique !
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  • Autobiographie en films. Une bonne critique de film nous en révèle souvent autant sur son auteur que sur le film lui-même : mes textes parlent donc de mes goûts cinématographiques, de ce qui me construit au cinéma, mais aussi de... moi. Bienvenue !
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