On the Ice, d'Andrew Okpeaha Maclean
14e Festival Ciné 32 - samedi 15 octobre, 8h45
Tout le monde se souvient de la magistrale séquence de Cary Grant se réfugiant dans le champ de maïs dans North by Nothwest / La Mort aux Trousses. Dans la série d'émissions Cinéma, Cinémas d'André Labarthe, Alfred Hitchcock avait rappelé en détails la genèse de cette séquence célébrissime durant laquelle il avait voulu contourner tous les clichés cinématographiques en vigueur dans les polars pour ce genre de scène où l'on fixe un faux rendez-vous à un témoin gênant dans le but de le tuer discrètement : la nuit, un espace urbain, la pluie qui dégouline sur les pavés luisants, une limousine qui arrive, et tacatacatac !!! Dans le guet-apens monté pour éliminer George Kaplan, rien de tout cela, Hitchcock a souhaité prendre le contre-pied de tous ces stéréotypes : un désert à perte de vue, un soleil implacable au zénith, personne à l'horizon.
Le réalisateur Andrew Okpeaha Maclean semble avoir longuement intégré et médité ce concept pour l'étendre à l'ensemble de son premier long métrage, On the Ice, film noir tourné dans un monde de glace, qui enchante le spectateur en réinterprétant l'ensemble des codes du thriller et en les détournant à la sauce inupiaq. Pardon ? Séquence Connaissance du Monde : l'inupiak est l'un des quatre grands ensembles linguistiques de la langue inuit, utilisé dans l'extrême nord de l'Alaska, d'où sont originaires le réalisateur et l'ensemble de son casting.
L'intrigue, qui tourne autour de la mort accidentelle d'un adolescent, est probablement assez classique, mais son simple déplacement dans ces contrées relativement vierges cinématographiquement la rend trépidante, tout comme son dépaysement temporel, puisque le soleil ne se couche jamais durant quelques mois sur ces étendues blanches et glacées où le regard se perd à l'infini et où nos repères s'effacent. Un dépaysement qui frappe plus encore, paradoxalement, lorsqu'on constate qu'ici comme ailleurs, au fin fond de l'Arctique comme au milieu de New-York, les ados de notre société mondialisée se ressemblent étrangement. Si loin, si proches.