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21 octobre 2010

Himalaya, where the wind dwells, de Jeon Soo-il

Festival Ciné 32 - Vendredi 15 octobre, 8h30

Dans tous les sens du terme, le Festival d'Auch a atteint les sommets dès sa première projection matinale. Une fois de plus, le miracle sud-coréen a opéré : après la pauvreté cinématographique de la séance d'ouverture, Jeon Soo-il nous offre une véritable proposition (voire une leçon) de cinéma pur. L'argument du film entier tient en une phrase : un employé coréen part au Népal pour apporter à sa famille les cendres d'un ouvrier de son entreprise tué dans un accident du travail.

Comme nombre de films récents que j'ai beaucoup aimés, Himalaya est un film contemplatif qui insuffle une onde apaisante, une vague harmonieuse, un élan de communion avec la création. Plus encore que vers la famille de cet ouvrier népalais, le héros effectue un voyage au sein de sa propre âme, un périple au coeur de son identité profonde. Il revêt les traits de Choi Min-sik, cet acteur sud-coréen électrisant et charismatique découvert dans le splendide Old Boy de Park Chon-wook il y a quelques années. Le cinéaste enchaîne, comme autant d'instants de grâce, des moments de pure mise en scène : on ne m'ôtera jamais de l'idée que tout l'art du cinéma repose là, dans de longues séquences où nul ne communique oralement mais où, pourtant, tout est signifiant et tout "parle", plutôt que dans ces films davantage apparentés au théâtre selon moi (suivez mon regard qui lorgne notamment du côté d'un cinéaste de Manhattan adulé par la critique...), où l'intrigue s'appuie principalement sur des échanges interminables et abrutissants de dialogues proches d'une inépuisable logorrhée...

 

Himalaya_Where_the_Wind_Dwells_p3

Une bonne première demi-heure ne comporte pas le moindre réel dialogue, à peine quelques mots étouffés, émis du fond d'un cadre, comme des sons parmi d'autres. D'autres sons prendront ensuite le dessus : le bruit entêtant des pas dans les montagnes désertes qu'empruntent le héros et son guide, la crécelle du grand-père une fois arrivés au village perdu dans ce monde aride et âpre, la flûte du jeune garçon qui sera la seule réelle communication qui s'établira avec Choi. Et ce vent omniprésent, grisant et épuisant en même temps, un vent à écorner les yaks qui laisse le personnage en état de choc constant, assommé par le Mal des Montagnes, comme sonné et perdu en lui-même.

Dès la première image, le cinéma éclate, lors de ce plan-séquence qui accompagne le héros depuis sa cabine d'ascenseur jusque dans des couloirs froids et impersonnels. Comme une évidence, certains cadres sont réglés au millimètre près, acquérant ainsi une perfection plastique étonnante malgré l'apparent "rien" qui s'y joue parfois, à l'instar de ce plan où Choi finit une vaisselle à l'arrière plan de sa cuisine avant de se rapprocher de nous et de saisir une télécommande que nous avions remarquée au premier plan dès le début de la scène. Anecdotique en apparence, mais vraie claque de mise en scène.

himalaya

Lorsque nous quittons le monde urbain surpeuplé et asphyxiant pour nous rapprocher des montagnes de l'Himalaya, une ivresse de spectateur nous gagne, semblable à celle parfois éprouvée dans le splendide Gerry de Gus Van Sant. Nous partageons alors la quête spirituelle du héros, égaré dans ce monde minéral, minuscule au milieu de ces paysages épurés et superbes. Ce vertige n'est pas prêt de nous quitter : à travers un minimalisme érigé en règle de cinéma, par le biais d'une apparente sécheresse et d'un dépouillement certain de sa mise en scène, le réalisateur nous convie à perdre nos repères pour partir pour le plus beau des voyages, celui de notre propre conscience, une fois débarrassés de tous les oripeaux de la modernité qui nous entourent. Grandiose.

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  • Autobiographie en films. Une bonne critique de film nous en révèle souvent autant sur son auteur que sur le film lui-même : mes textes parlent donc de mes goûts cinématographiques, de ce qui me construit au cinéma, mais aussi de... moi. Bienvenue !
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