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28 novembre 2010

Elle s'appelait Sarah, de Gilles Paquet-Brenner

"Elle s'appelait Sarah" est d'abord un dialogue à distance étonnant avec "La Rafle" de Roselyne Bosch, qui a été tant décrié à sa sortie en mars dernier et comparé à un tire-larmes parfois indécent, même s'il m'avait justement laissé totalement sec à l'époque. Le film de Gilles Paquet-Brenner aligne d'abord à quelques légères variantes près les mêmes séquences que "La Rafle" : la vie d'une famille au coeur du quartier du Marais, la rafle de juillet 1942 (accompagnée de la lâcheté ou de l'ignominie des voisins, à commencer par la figure de la concierge vers laquelle convergent toutes les accusations), les quelques jours terribles passés au Vel' d'hiv' (avec la même "évasion" d'une jeune femme, qui peut laisser penser que Roselyne Bosch s'est étroitement inspirée du roman de Tatiana de Rosnay pour écrire son propre scénario), l'arrivée au camp de Beaune-la-Rolande avec la séparation des familles puis des enfants de leur mère.

Sarah

L'épaisseur des personnages de la "partie 1942" permet à Paquet-Brenner de remporter la donne : ce ne sont plus seulement des illustrations quasi-anonymes d'une tragédie historique, des pions qui servent à étayer une thèse et une dénonciation louable, mais des êtres auxquels la mise en scène donne de la chair en prenant son temps, à commencer évidemment par la Sarah éponyme, dotée d'un caractère hors normes, attachée corps et âme à la vie mais qui finira par sombrer irrémédiablement dans la faille que l'histoire a creusée en elle.

"Elle s'appelait Sarah" gagne également en résonnance grâce à l'alternance entre 1942 et aujourd'hui, sans recours au moindre noir et blanc ou à une autre technique appuyée de montage pour souligner le passage du temps. Les transitions sont au contraire volontairement floues, les figures de Sarah et du personnage de Kristin Scott Thomas (actrice qui me fascine toujours autant...) s'interpénètrent, se confondent, dialoguent à travers le temps, comme si les années écoulées étaient abolies.

La_Rafle

"La Rafle" était un film "utile", pédagogiquement intéressant pour rappeler à tous les heures sombres de notre histoire, le rôle du gouvernement français dans la déportation des juifs. "Elle s'appelait Sarah" remplit également parfaitement ce rôle nécessaire de réveil des consciences et de devoir de mémoire (notamment par une séquence très sobre tournée au Mémorial de la Shoah, où les noms de milliers de déportés sont gravés sur d'immenses murs blancs). Mais les scènes contemporaines permettent à cette adaptation de dépasser la simple "leçon d'histoire" et d'aborder d'autres questions : celle de la mémoire, celle de l'histoire intime et familiale qu'on choisit de révéler ou non, du refoulement, celle de la transmission, du poids des secrets de famille, du passage de témoin, de la vérité qu'on a le courage d'affonter ou non...

elle_s_appelait_sarah

Et même si une larme versée n'est pas garante de la qualité d'un film, l'émotion qui m'a envahi durant la dernière séquence a au moins souligné une chose : l'empathie forte que réussit à instiller le réalisateur. La projection de "Elle s'appelait Sarah" m'a donné envie de découvrir à présent le roman dont il est l'adaptation mais aussi de réécouter la chanson "Comme toi" de Jean-Jacques Goldman, que je connais depuis toujours mais dont j'ignorais jusqu'à peu qu'elle était une transposition musicale de cette histoire.

Dossier Pégagogique du Film

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  • Autobiographie en films. Une bonne critique de film nous en révèle souvent autant sur son auteur que sur le film lui-même : mes textes parlent donc de mes goûts cinématographiques, de ce qui me construit au cinéma, mais aussi de... moi. Bienvenue !
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