Black Swan, de Darren Aronofsky
Il est souvent difficile d'exprimer un point de vue original sur un film qui a été très amplement discuté dans les semaines qui ont précédé. Black Swan fait partie de ces films qui ont été sur toutes les lèvres mais que je n'ai découvert pour ma part que lors de la semaine des Oscars (les joies de la programmation en VO dans les petites villes de province...)
J'ai adoré Requiem for a Dream de Darren Aronofsky, parfaite adéquation entre un sujet et une mise en scène. The Wrestler m'a touché sans me convaincre pleinement, mais j'attendais tout de même énormément de ce Cygne Noir. Autant le dire tout de suite, il ne m'a pas emporté comme je l'escomptais. Entendons-nous bien : Black Swan est un bon film, parfaitement dirigé, joué, monté et réalisé, mais j'espérais probablement qu'il constitue à mes yeux un choc visuel et émotionnel aussi fort que Requiem...
Le principal obstacle que j'ai rencontré réside dans la multitude de références implicites à d'autres oeuvres cinématographiques qui n'ont cessé de me sauter aux yeux et de me parasiter la vision de ce chant du cygne. En d'autres lieux, j'aurais peut-être estimé que ces références enrichissaient l'histoire ou la profondeur du récit mais, dans le cas présent, elles ont plutôt contribué à faire diversion et à me détourner du coeur du film. Je pense en particulier à Répulsion de Roman Polanski (pour le filmage du point de vue d'une héroïne névrosée), à Carrie (pour la mère protectrice à l'excès, copie conforme trop caricaturale du personnage du film de Brian de Palma), même à La Mouche et surtout, surtout, aux Red Diaries de Michael Powell et Emeric Pressburger, dont l'ombre est constamment présente pour moi d'un bout à l'autre de ce long métrage, jusque dans sa structure d'histoires parallèles (le destin de l'héroïne finit par rejoindre tragiquement celui du personnage qu'elle incarne sur scène).
A vrai dire, l'immensité intimidante des Chaussons Rouges a déserté mon esprit le temps d'une séquence sublime, un moment suspendu qui suffira à m'inciter à revoir d'un autre oeil le film de Darren Aronofsky dans l'avenir et à le reconsidérer : la transformation effective de Natalie Portman en black swan sur scène, tourbillon de grâce qui glisse dans le fantastique et donne des frissons.